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Vigilants sur la situation des précaires et sans-abris dans cette période

Lettre ouverte envoyée au Ministre de la Ville et du Logement, le 20 mars 2020

Organisations signataires : ACDL, AFOC, AFVS, AITEC, CAL, CGT, Collectif Logement Paris 14, Coordination nationale Pas Sans Nous, COPAF, CRLDHT, DAL, FTCR, HALEM, Indecosa CGT, Paris VsBnB, Robin des Villes, Union Syndicale Solidaires, UTAC


Monsieur Julien DENORMANDIE Ministre de la ville et du logement
20, avenue de Ségur
75007 PARIS

Paris, le 20 mars 2020

Monsieur le ministre,

Nos organisations ont appelé à manifester, le samedi 28 mars en France (appel ci-joint), dans le cadre de la journée européenne contre les expulsions, le logement cher et la spéculation qui impactent durement les sans-abris et les locataires. Compte tenu du développement de l’épidémie de Coronavirus, des mesures de confinement de la population, et de l’annonce du report de la trêve hivernale jusqu’au 31 mai, nous avons décidé de reporter cette journée de manifestations.
Pour autant, nous resterons vigilants sur la situation des précaires et sans-abris dans cette période. Le Gouvernement a pris des mesures dans le secteur du logement pour faire face à la crise sanitaire, mais elles s’avèrent d’ores et déjà insuffisantes, tout comme le projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de COVID 19, déjà en discussion. En effet, malgré le maintien des places en CHU d’hiver, beaucoup de sans-abris sont encore dans les rues. D’autres sont accueillis dans des gymnases ou des dortoirs dans des conditions d’hygiène parfois contestables au plan sanitaire du fait de la promiscuité.

De plus, plusieurs dizaines de milliers de personnes vivent dans des conditions de logement dangereuses au plan humain, exposés au virus et facilitant de surcroît sa propagation. Comment rester confiné lorsque l’on vit en surpeuplement grave, dans un taudis, dans un logement de fortune ou impropre à l’habitation, infesté de punaises et de rongeurs ? Des mesures particulières sont absolument nécessaires. Vous avez fait part de votre intention de réquisitionner des locaux vacants à des fins d’hébergement le 10 février dernier, avant l’épidémie. Or, il ne nous semble pas que les Préfets soient passés à l’acte depuis cette date.

Pourtant le pays n’a jamais compté autant de logements vacants. Paris compte non seulement 114 000 logements vacants, mais aussi plusieurs dizaines de milliers de logements loués temporairement sur des plateformes type Airbnb et actuellement vacants, ainsi que des milliers de places dans les hôtels, vides de touristes. Puisque “nous sommes en guerre”, la réquisition s’impose aussi bien pour des raisons humanitaires que sanitaires, en attendant la mise en place de solutions de relogement stables, à loyer modéré, décents et hors de tout danger. D’autre part, beaucoup de salariés, d’autoentrepreneurs, de travailleurs indépendants ou non déclarés vont se trouver dans l’incapacité ou en grande difficulté pour régler leur loyer ou leur traite.

C’est pourquoi, nous demandons au gouvernement de prononcer un moratoire sur les loyers (pour les locataires) et les traites (pour les accédants), pendant toute la durée de la pandémie. Il faut également interdire les coupures d’électricité, de gaz, mais aussi les interruptions d’internet et de téléphone qui peuvent mettre en danger les personnes frappées notamment par la maladie. Les coupures d’eau sont certes interdites par la loi Brotte, mais des distributeurs passent outre dans certains départements, il faut aussi y mettre fin.

Ces dispositions, doivent absolument être intégrées dans le projet de loi, car le sujet des sans abris, des mal logés et des locataires en a manifestement été exclu, tout comme la suspension des délais de recours liés au contentieux locatif prévu dans son article 17. Vous avez reporté la « contemporanéisation » des APL, mais il faudrait plutôt y renoncer et renforcer les APL afin de solvabiliser les locataires modestes aujourd’hui en difficulté.

Concernant enfin les expulsions locatives, nous sommes dans l’attente du texte officiel créant un répit supplémentaire de 2 mois. Nous insistons sur la nécessité de réprimer les expulsions illicites qui ont malheureusement encore lieu dans notre pays. Pour cela, une circulaire d’application relative à l’article 226- 4-2 du code pénal auprès des parquets et de la police est nécessaire.

Nous sollicitons donc un entretien dans les meilleurs délais pour vous faire part de nos constats et nos propositions.

Dans l’attente veuillez recevoir monsieur le Ministre du logement, l’expression de nos salutations distinguées.

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